Les vieux papilons

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Les vieux papillons

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Un mois s’ensauve, un autre arrive.

Le temps court comme un lévrier.

Déjà le roux genévrier

A grisé la première grive.

Bon soleil, laissez-vous prier,

Faites l’aumône !

Donnez pour un sou de rayons.

Faites l’aumône

A deux pauvres vieux papillons.

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La poudre d’or qui nous décore

N’a pas perdu toutes couleurs,

Et malgré l’averse et ses pleurs

Nous aimerions à faire encore

Un petit tour parmi les fleurs.

Faites l’aumône !

Donnez pour un sou de rayons.

Faites l’aumône

A deux pauvres vieux papillons.

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Qu’un bout de soleil aiguillonne

Et chauffe notre corps tremblant,

On verra le papillon blanc

Baiser sa blanche papillonne,

Papillonner papillolant.

Faites l’aumône !

Donnez pour un sou de rayons.

Faites l’aumône

A deux pauvres vieux papillons.

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Mais, hélas ! les vents ironiques

Emportent notre aile en lambeaux.

Ah ! du moins, loin des escarbots,

Ô violettes véroniques,

Servez à nos coeurs de tombeaux.

Faites l’aumône !

Gardez-nous des vers, des grillons.

Faites l’aumône

A deux pauvres vieux papillons.

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❤️ Jean Richepin ❤️

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8 réflexions sur “Les vieux papilons

  1. Superbe et touchant que ce poème qui met en vers très justes la fin de vie de deux vieux papillons qui font l’aumône de quelques beaux moments. A la lecture de ces lignes, on s’apitoie sur leur sort.

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